Pour le patronat informatique, tout va pour le mieux dans le petit monde des grandes SSII : l’activité repart et ils vont embaucher par milliers. Derrière les beaux discours, la réalité sociale est toute autre. Notamment concernant la politique salariale.
« Il y a une assez bonne reprise de la demande et on est orienté croissance! », s’enthousiasme Paul Hermelin, le Petit Père du peuple Capgeminien sur l’antenne de BFM Business. Sur cette même antenne – aussi objective sur le monde économique que pouvait l’être Radio Moscou sur l’efficacité du Soviet Suprême – Hermelin rassure les investisseurs. A la fin de l’année dernière, Capgemini avait « un cash positif de 1,3 milliard » et se demande même : « avec cette force de frappe, qu’allons-nous faire ? ». Il a sa réponse : « continuer nos emplettes dans les pays émergents » et « dans les pays mûrs, créer de l’emploi. » Il lance même ce lénifiant : « nous allons recruter des milliers de bac + 5″, comme s’en fait l’écho la version professionnelle du magazine 01Net.
La Madame Irma numérique
En 2011, l’emploi est véritablement le mot d’ordre des SSII. Philippe Tavernier, le président de la commission social, emploi et formation du Syntec numérique, voit dans sa boule de cristal que : « En 2011, 73 % des entreprises (…) anticipent une progression de leur effectif avec un prévisionnel d’environ 40 000 recrutements ». Notez que la Madame Irma numérique s’appuie sur des sondages pour tenir ses propos et prédire à 01Net que cela « pourrait générer jusqu’à 10 000 créations nettes d’emplois. » Des annonces que j’ai déjà largement mis en relief sur ce blog avec les opérations de communication bidons des recrutements de masse au sein d’Akka, Altran et Capgemini.
Réalité sociale
La réalité sociale dans les SSII n’en reste pourtant pas flatteuse. Après deux années de crise où les salariés ont vu leurs salaires stagner, 2011 ne marquera pas des augmentations attendues au vue de la reprise d’activité. Ainsi, les mouvements sociaux s’amplifient : Akka Informatique&Systèmes, Assystem ou encore Nyse Technologies et Alcatel-Lucent comme le rappelle le magazine référence de l’informatique. Des mouvement dus à des négociations annuelles obligatoires au rabais où les directions continuent de rogner sur leur masse salariale.
Groupe Open : le mauvais exemple
D’ailleurs devons-nous faire confiance au Syntec numérique ? L’action de son patron, Guy Mamou-Mani, qui officie à la direction du Groupe Open, permet d’en douter. Ainsi, le groupe a subit une restructuration en 2010 qui a vu partir 350 salariés. Guy veut maintenant en embaucher 800 nous apprend Le Monde Informatique. Un spécialiste du secteur confie : « il s’est séparé de près de 10% de ces effectifs l’an passé et il dit aujourd’hui : « finalement, j’aurais pu leur donner du travail. » Une singulière gestion des ressources humaines…
Les SSII suppriment des emplois
D’ailleurs, les créations d’emplois n’auront jamais lieu dans le secteur. Ainsi, comme l’explique l’ « Etude sur l’emploi, les salaires et les conditions de travail dans les SSII » réalisée l’année dernière par le cabinet Sécafi au profit de la fédération CGT Sociétés d’études, il y aura même suppressions d’emplois ! S’appuyant sur une étude du BIPE, société de conseil en stratégie spécialisé dans la prévision économique et la prospective, « il y aurait entre -20.000 et – 27.600 suppressions nettes d’emplois entre 2010 et 2012 », soit entre -10 000 à -18 000 entre 2011 et 2012. On est bien loin des incantations du Syntec numérique en termes d’embauches.