
Jean-François, Florence et Marin, les trois lumières de Sogeti HT n'auront pas brillées sur le code du travail
Les ingénieurs informatique toulousains ont vraiment de la chance ! Depuis quelques mois, les SSII annoncent recruter en masse. Job-dating dans des bars branchés, invitation au Stade-Toulousain pour voir un match de rugby, after-work : c’est une débauche de bling-bling social qui envahit la Ville rose. Et Sogeti High Tech entre dans la danse.
Quelle bande de veinards ces ingénieurs des SSII toulousaines ! Après un job-dating organisé par Akka, Altran qui est venu draguer les étudiants de l’ESC, Sogeti High Tech (HT) leur promet maintenant de recruter 300 personnes ! Un chiffre qui demande une analyse surtout après l’annonce du patron de Capgemini Sud, la maison-mère de Sogeti HT. Ce dernier avouait effectivement que sur les 400 embauches promises, seules environ 230 seraient de la création nette d’emploi.
Bling-bling social au champagne
Pour annoncer l’heureux événement, Sogeti HT a fait appel à trois personnes : Jean-François Bulvestre et Marin Mignot, les directeurs Midi-Pyrénées, et Florence Assouline-Ravel, la directrice des Ressources Humaines de Sogeti HT. Les prédicateurs de l’emploi à-tout-va avaient déjà conviés, samedi dernier, une centaine de candidats potentiels au Stade Toulousain pour assister au match de rugby Stade-Toulousain/Clermond-Ferrand pour une « opération cooptation ».
« C’était bizarre, confie une personne qui a assisté à l’événement. Les candidats passaient des entretiens où le champagne coulait à flots. Il y avait aussi pleins de plateaux de petits canapés et de macarons. » Bling-bling social quand tu nous tiens…
Ce mardi matin, la presse ne s’est pas déplacée en masse pour participer à la conférence de presse sur les 300 postes. Sept journalistes seulement auront pu se procurer le dossier de presse où l’on apprend que « plus de 650 postes (sont) à pourvoir dont 300 en Midi-Pyrénées » qui concerne 36 métiers et où un lénifiant : « Vivez votre passion sans concession ! » est lancé.
Les coulisses du théâtre
Nos trois personnages ont donc pris place au bar « Les Coulisses » : Jean-François, Marin et Florence qui auront l’aide précieuse d’Annabelle. Cette dernière fait office de souffleur quand ils calent sur une question. Du vrai théâtre ! JF, un peu en retrait, se lance en ne quittant pas des yeux ses notes fluotées en vert : « 2009, c’était la crise. En 2010, c’est le recovery, et en 2011 l’économie repart réellement. Nous sommes associés à la vie de nos clients. Quand ils vont biens, nous allons biens ! », clame-t-il.
« L’objectif de mon intervention, c’est de vous donner une vision simple de Sogeti Hgh Tech, poursuit-il. Nous sommes réglés sur les valeurs de Capgemini.» Et il répète le dogme capgeminien des sept valeurs du groupe où l’on retrouve le plaisir car : « c’est plus plaisant de travailler avec le sourire, pas sous la contrainte. » Le prêtre-ouvrier informatique passe alors la parole à son collègue.
Marin Mignot annonce que : « Nous faisons du sourcing » avant de demander : « Qu’est-ce que nous offrons ? Toute la palette de nos métiers », répond-il tout de go. Florence explique que « les ressources humaines (RH), c’est un domaine d’activité de l’entreprise important pour le suivi de carrière de nos collaborateurs » ou encore que « ce qui attire nos candidats, c’est la diversité des projets, nos clients et notre politique RH. » Elle aussi a son slogan : « Nos collaborateurs sont nos ambassadeurs ! »
Green-washing social
Voilà donc pour la façade véritablement « simplifiée » de l’entreprise. Car, quand les questions se font plus précises, nos trois loustics se dérobent avec l’aide de l’étrange Annabelle. Ils tentent d’abord de nous enfumer avec un couplet sur l’environnement. « On a un bilan carbone pour vérifier qu’au niveau de l’environnement on respecte nos engagements », commence Florence. « En entretien d’embauche, les candidats nous posent des questions sur les ampoules qu’on utilise pour savoir si on fait un effort », embraye Marin. « J’ai un exemple très concret avec le tri sélectif, s’enthousiasme Jeff’. On demande aux gens d’enlever les agrafes des documents qu’ils jettent. C’est une démarche citoyenne. » « On a une démarche de sensibilisation à l’environnement, c’est de la citoyenneté ! », s’enorgueillit Florence.
Ils sont vraiment sympa ces trois-là, à nous vanter leur partenariat avec Tisséo (régie de transports en commun) ou encore à demander à leurs salariés de venir bosser à vélo. Et le tri sélectif ! et les ampoules ! Des vrais lumières ! On repeint en vert une réalité bien sombre car quand on aborde le code du travail, les plombs sautent.
Code du travail écorné
Effectivement, pas un mot sur les salaires ! « ça dépend de l’expérience, on va par exemple valoriser l’école d’où ils sortent, explique Marin. Mais le salaire d’entrée, c’est de 30 à 31 000€ par an sur Toulouse. » D’après un document interne, en 2010 56% des salariés touchaient moins de 34 308€ et seulement 2% plus de 68 616€ annuels. « Je n’ai pas à commenter ces chiffres », répète Marin après avoir imploré l’aide de l’énigmatique Annabelle.
Sur les 300 embauches, les joyeux drilles annonceront que « 2/3 sont de la croissance nette et que donc il y a 200 créations d’emploi ». Tiens dont, nous ne sommes plus à 300 embauches ? Un article de l’organisation professionnelle MUNCI remet pourtant les pendules à l’heure: d’après l’article L5331-3 du code du travail, il est interdit : « de faire publier dans un journal, revue ou écrit périodique ou de diffuser par tout autre moyen de communication accessible au public une insertion d’offres d’emploi ou d’offres de travaux à domicile comportant des allégations fausses ou susceptibles d’induire en erreur et portant en particulier sur un ou plusieurs éléments suivants : 1° L’existence, le caractère effectivement disponible, l’origine, la nature et la description de l’emploi ou du travail à domicile offert ; 2° La rémunération et les avantages annexes proposés ; 3° Le lieu du travail. » Et le MUNCI d’enfoncer le clou : « Ainsi, une offre qui ne correspond pas à un poste précis et disponible est tout simplement illégale… »
Sur ce sujet, nos trois écolo-pipeau ne diront pas un mot répétant : « nous embaucherons vraiment 300 personnes. » Qui auront droit à de belles ampoules à économie d’énergie !